La fabrique d'un métier

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La forma­tion profes­sion­nelle des appren­tis et du person­nel, contri­buant à la trans­mis­sion du métier de boucher, consti­tue une acti­vité et une mission centrales, plutôt mécon­nues, des abat­toirs de Lausanne

Avec le déve­lop­pe­ment de l’abat­tage à la chaîne, les savoir-faire bouchers liés à la pratique de l’abat­tage indi­vi­duel, comme le dépouille­ment des carcasses, sont désor­mais décom­po­sés et distri­bués entre diffé­rents profes­sion­nels sur l’en­semble de la chaîne d’abat­tage. Même si ces pratiques restent consi­dé­rées comme fonda­trices du métier de boucher, elles consti­tuent, dès le milieu des années 1970, un élément option­nel dans la forma­tion offerte à l’ap­prenti qui peut suivre, un appren­tis­sage « A » avec abat­tage ou un appren­tis­sage « B » sans abat­tage, centré sur la prépa­ra­tion de la viande et la vente.

Patrick Martin, « Examens : des apprentis sont notés pour leur travail », Abattoirs de Malley, 09.06.1993, © Agence A.I.R, Patrick Martin, Archives cantonales vaudoises.
Patrick Martin, « Examens : des apprentis sont notés pour leur travail », Abattoirs de Malley, 09.06.1993, © Agence A.I.R, Patrick Martin, Archives cantonales vaudoises.
La mise à mort des animaux est un enjeu pédagogique complexe et délicat dans le cadre de la formation professionnelle des bouchers. Témoignage de Stéphane Devallonné , maître principal en boucherie et formateur professionnel. © 2020, IHM CHUV-UNIL et Association AAU.

Depuis, la forma­tion s’est encore diver­si­fiée pour se fixer actuel­le­ment à trois orien­ta­tions à choix : la produc­tion de la viande (avec abat­tage), la trans­for­ma­tion de la viande ou la commer­cia­li­sa­tion de la viande.

Examens de fin d'apprentissage, calculs écrit pour boucher-charcutier, 1966, Archives cantonales vaudoises, SB 49/284 dossier 522.
Examens de fin d'apprentissage, calculs écrit pour boucher-charcutier, 1966, Archives cantonales vaudoises, SB 49/284 dossier 522.
Détail du Guide du boucher-charcutier édité par l’Union Suisse des Maîtres-Bouchers (USMB) en 1972, (réédition de 1978, p.45).
Détail du Guide du boucher-charcutier édité par l’Union Suisse des Maîtres-Bouchers (USMB) en 1972, (réédition de 1978, p.45).

L’abat­toir public, moins soumis aux pres­sions écono­miques que les abat­toirs privés, joue un rôle impor­tant dans le domaine de la forma­tion des profes­sion­nels des métiers de la viande. A Malley, les arti­sans et les appren­tis accèdent à des locaux, du bétail et des instal­la­tions répon­dant aux exigences légales, mis à leur dispo­si­tion dans le cadre de cours théo­riques ou pratiques. Ces pres­ta­tions ne sont pas factu­rées selon des critères pure­ment commer­ciaux et leurs coûts sont englo­bés dans le budget de fonc­tion­ne­ment de l’abat­toir.

Petit lexique de base du parler boucher destiné aux apprentis. Guide du boucher-charcutier, édité en 1972 par l’Union suisse des Maîtres-Bouchers, (réédition de 1978, p.269).
Petit lexique de base du parler boucher destiné aux apprentis. Guide du boucher-charcutier, édité en 1972 par l’Union suisse des Maîtres-Bouchers, (réédition de 1978, p.269).
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Présentation de divers morceaux de viande de veau à l’intention des apprentis. Guide du boucher-charcutier, édité en 1972 par l’Union suisse des Maîtres-Bouchers, (réédition de 1978, p.168).
Présentation de divers morceaux de viande de veau à l’intention des apprentis. Guide du boucher-charcutier, édité en 1972 par l’Union suisse des Maîtres-Bouchers, (réédition de 1978, p.168).
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Si l’éven­tail des cours dispen­sés varie au fil du temps, ils concernent prin­ci­pa­le­ment la forma­tion théo­rique ou pratique des inspec­teurs des viandes, vété­ri­naires ou non, des appren­tis bouchers-char­cu­tiers, des marchands de bétail, des trans­por­teurs de bétail et autres profes­sion­nels des abat­toirs. Progres­si­ve­ment, les abat­toirs de Lausanne deviennent un lieu de passage fami­lier pour les profes­sion­nels des métiers de la viande au cours de leur forma­tion ou de leurs acti­vi­tés. C’est ce qu’é­voque Jacques Chapuis, Maître boucher-char­cu­tier et forma­teur profes­sion­nel, en se remé­mo­rant certains moments de son parcours de forma­tion :

« Apprenti, je suivais les cours à l’EPSIC (École profes­sion­nelle de Lausanne). Notre profes­seur de tech­no­lo­gie vété­ri­naire, M. le Dr Dapples, fonc­tion­nant aux abat­toirs de Lausanne, ne souhai­tait pas se dépla­cer jusqu’à l’école, c’est donc la ving­taine d’élèves appren­tis-bouchers qui descen­daient en cohorte et chaque mercredi jusqu’à Malley… J’ai passé mes examens CFC dans la région lausan­noise, à Pully, mais c’est aux abat­toirs de Lausanne que trois experts se sont réunis pour m’in­ter­ro­ger sur la tech­no­lo­gie profes­sion­nelle. Et lors de mes examens de maîtrise fédé­rale, c’est égale­ment aux abat­toirs de Lausanne que j’ai dû me soumettre aux épreuves de calcul profes­sion­nel, de comp­ta­bi­lité et de droit.»

La formation de boucher-charcutier telle qu’elle est présentée dans l’émission “A vous de choisir” à travers le témoignage d’apprentis, de professeur et d’un maître d’apprentissage. Boucher-charcutier, A vous de choisir, 20.01.1965 ; RTS Radio Télévision suisse. Attention, certaines images peuvent heurter les sensibilités!

Sources

  • « Demain à la TV, Vie et métier, boucher-char­cu­tier », in : Jour­nal d’Yver­don, 26 décembre 1967, p.2.
  • Ordon­nances fédé­rales concer­nant la forma­tion profes­sion­nelle du boucher-char­cu­tier (1934–2018).
  • Témoi­gnages d’an­ciens et d’an­ciennes employés et employées des abat­toirs, 2019–2020, IHM CHUV-UNIL et Asso­cia­tion AAU.
  • « Varié et offrant d’in­té­res­santes pers­pec­tives, le métier de boucher-char­cu­tier », in : 24 heures, 26 janvier 1988, p. 24.

Litté­ra­ture secon­daire

  • Anne-Marie Martin « Apprendre la viande, du XXe siècle à nos jours », in : Pour une histoire de la viande, Fabrique et repré­sen­ta­tions de l’An­tiquité à nos jours, Bruno Laurioux, Marie-Pierre Horard, pp 373–386.
  • Pierre Saunier, « Le boucher, un commerçant qui « vend en l’état » ou un arti­san qui vend ce qu’il découpe ? » in : Pour une histoire de la viande, Fabrique et repré­sen­ta­tions de l’An­tiquité à nos jours, Bruno Laurioux, Marie-Pierre Horard, pp 331–350.